Ce monument qu'est la Danse Orientale
À la définition du mot ''danse'', j'ajouterai que la danse est la traduction artistique et poétique d'une émotion recueillie par le corps.
Aussi, de ma première rencontre avec la musique de Farid El Atrache, je garde le souvenir intense et cuisant d'un flot de sensations bouleversantes aussitôt muées en une frustration aiguë, puisque figées par l'impossible expression de ce ressenti jailli et inexploité.
En effet, comment épouser le son lancinant du nay ? Comment évoluer sur les rythmes de la darbouka ? Comment vivre le son enlevé du violon ? Comment comprendre cette musique et la transcrire au plus près avec son corps ?
Il fallait la danser et donc... apprendre.
En 1989, mes pas m'ont dirigée vers celle qui a changé le tracé de ma vie professionnelle, Fatima Chekkor (au Centre du Marais à Paris), qui est, à mon sens, l'une des plus grandes danseuses de Raks Sharki et l'une des plus grandes pédagogues.
Si en franchissant le seuil du cours de F. Chekkor, j'avais en moi, chevillé, le désir d'apprendre la maîtrise de cette danse, Fatima a définitivement transcendé ce désir en véritable obsession. Avant toute chose, elle a su me donner l'envie de me féminiser et de me dépasser.
Puis, elle m'a d'abord enseigné la rigueur indispensable pour pouvoir ensuite intégrer les bases incontournables et fondamentales de la technique et de la pédagogie. Les cours privés et collectifs passés à ses côtés alliés à un travail quotidien, acharné, personnel et solitaire m'ont permis d'approcher cet art exceptionnel qu'est la danse orientale. De jour en jour, d'année en année, je n'ai cessé de travailler et de retravailler, puis un jour, enfin, on se sent investi ; de la technique, le geste est enfin passé à l'artistique. Le bras se lève avec volupté, comme mué par sa propre volonté, les hanches semblent désolidarisées du reste du corps, désormais plus libres et plus légers, les figures qu'elles dessinent sont plus amples, plus exaltées.
"La musique n'est plus seulement un support, on la vit enfin, nous ne sommes plus deux mais une seule."
Enseigner et valoriser la femme !
La danse ne saurait se résumer seulement à la transmission...
Il ne s'agit pas seulement d'expliquer le mouvement, le pas, le maintien, il est aussi très fortement question du rapport entre soi et son corps surtout avec la danse orientale. Rappelons qu'elle est la célébration de la féminité qui vit au coeur même de chaque femme, féminité étrangement stigmatisée et dont le tabou tenace est aujourd'hui source de difficultés telles que rigidité, honte, pudeur face à la valorisation de certaines parties du corps.
Il m'incombe de rassurer et d'aider ces femmes à se découvrir, à s'harmoniser avec leur corps, à s'épanouir dans leur féminité. Aussi, certaines vont aller vers un travail de réconciliation avec leur corps et de ré-appropriation, d'autres de découverte. En acceptant d'abord de mouvoir, tout en isolant, leur buste, leurs bras et leurs hanches puis tenter de les maîtriser, elles vont finalement apprendre à considérer ou reconsidérer leur corps parce qu'il les rendra fières et belles.
Que nous soyons rondes, très longues, minces, petites ou chétives, jeunes ou moins jeunes, nous n'en demeurons pas moins femme, et à ce titre, la danse orientale a la particularité de s'adapter à tous les corps et d'en faire jaillir leur sensualité.
Celles parfaitement à l'aise avec elles-mêmes et habituées, à travers d'autres disciplines, à travailleur leurs corps viennent chercher une nouvelle façon de s'exprimer, un nouvel apprentissage, une nouvelle danse encore méconnue mais qui fascine toute tranche d'âge. Elles attendent de leur corps un nouveau langage parce que la musique sur laquelle elles souhaitent évoluer résonne différemment. De la même façon, il m'incombe alors de les initier à cet art oriental en les guidant le plus justement possible tant dans la reconnaissance des rythmes que dans la technique.
Enseigner la danse est un bonheur de chaque instant, voir ses élèves sur scène donner le meilleur d'elles-mêmes, rendre hommage à ce monument qu'est la danse orientale, rendre fière leur enseignante est une émotion d'une grande intensité et chaque année renouvelée.
De Paris à la Charente en passant par la Charente-Maritime
En 1993, j'ai ouvert mon premier cours en banlieue Sud parisienne (91) où il n'existait pas de cours de danse orientale : Ris-Orangis, Arpajon, Palaiseau, Sainte-Geneviève-des-Bois ou encore Viry-Châtillon. En 2002, je quitte la région parisienne pour m'installer en Charente-Maritime où j'enseigne à Saintes (17), à Neuvicq-le-Château (17) et à Angoulême ( 16) en cours hebdomadaires, et à Royan sous forme de stage. J'interviens désormais uniquement à Angoulême en Charente à l’École de la Danse - Katia Seguin. Je fais quelques escales à Paris pour suivre les stages de F. Chekkor, afin d'apprendre encore et je profite donc de l'occasion pour la remercier très sincèrement et lui témoigner toute ma reconnaissance et mon admiration. Je remercie aussi Shariane (magasin Shariane à Paris) qui, toujours accueillante et patiente, cherche et trouve toutes les ceintures, accessoires et costumes que mes élèves me commandent depuis la Charente. Grâce à elle, mes spectacles de danse font rêver et illuminent le coeur des spectateurs.